En recherche
d’un chemin de vie et de fécondité

« Et si je venais à entrer au Carmel ?… »

…dialogue au parloir entre sr Marie Pascale, formatrice et Axelle, intéressée.

Le printemps des bourgeons

Axelle : Et si j’entrais au Carmel, comment ça se passerait ? J’aurais une formation ?

Sr Marie Pascale : Bien sûr ! Lorsqu’on entre au Carmel, le désir est là, de suivre le Christ où il nous appelle et le cœur est grand ouvert… mais nous arrivons avec tout ce qui a fait notre vie jusque-là : notre famille, nos amis, nos habitudes de vie (aujourd’hui, on se couche tard et on se lève rarement tôt !), nos goûts artistiques, nos lieux de détentes, nos études, notre profession, que sais-je ? Et tout cela va devoir trouver sa place dans cette nouvelle vie. On ne devient pas carmélite du jour au lendemain… Et puis, il y a tout à découvrir de ce qui fait la richesse du Carmel : la manière de prier, de vivre au quotidien, tout ce qui fait le patrimoine de notre famille spirituelle, la façon de se détendre seule ou ensemble… et j’en passe ! C’est tout un champ nouveau qui se découvre à nous !

Axelle : Et on commence par quoi ?

L’aspirantat

Sr Marie Pascale : Depuis peu d’années, lorsqu’une jeune a déjà fait connaissance avec la communauté et désire aller plus avant, elle demande à entrer en aspirantat. Il s’agit d’une formule « mixte » qui permet à la jeune sur une période d’au moins un an, parfois deux, de plonger en immersion à trois reprises, au Carmel. Il s’agit de stages plus ou moins longs (au moins quinze jours) pendant lesquels elle peut découvrir la communauté, son genre de vie, son type de travail, sa liturgie… Et la communauté, de son côté la découvre également. Il s’agit d’une première approche qui permet à la jeune de vérifier ses aptitudes sur « du réel » tout en conservant ses engagements et ses relations (famille, amis, travail etc.) Cette étape peut lui permettre non seulement de nous connaître, mais aussi de parfaire sa formation humaine ou religieuse, terminer ses études ou honorer ses responsabilités professionnelles. Cette étape suppose qu’elle s’engage envers la communauté et ne va pas faire d’expériences vocationnelles ailleurs.

Axelle : C’est donc déjà un engagement, même si elle n’est pas encore entrée ?

Sr Marie Pascale : Tout à fait, et cela fait partie des années de formation proprement dite. Au bout de ce temps, elle peut y mettre fin si elle le désire ou enclencher l’étape suivante.

Axelle : Et si c’est oui, elle entre au monastère ?

Le postulat

Sr Marie Pascale : Oui, elle commence alors son postulat pour une période d’un an. C’est un peu comme un sas entre sa vie d’avant et celle qui s’ouvre à elle : temps de découverte de la communauté dans la durée, de la manière de vivre, du rythme de l’année et de la liturgie ; temps aussi pour laisser décanter ce qui a précédé son entrée au monastère, de faire l’apprentissage d’un accompagnement de semaine en semaine avec la formatrice pour mieux se connaître elle-même…

Axelle : Et il y a des enseignements ?

Sr Marie Pascale: A cette étape de la formation, il y en a, bien sûr, mais peu, de façon à mettre davantage l’accent sur ce qu’on pourrait appeler l’acclimatation à l’écoute : acquérir un cœur de disciple et se former au dialogue avec la formatrice. Les enseignements deviennent plus importants à l’étape suivante…

Axelle : qui est ?

Le noviciat

Sr Marie Pascale: … ce qu’on appelle le noviciat. Cette période de deux ans est marquée par la prise d’habit qui nous fait entrer dans la grande famille du Carmel. Cette étape est très importante ; elle est marquée par un rythme plus soutenu d’enseignements et une entrée plus concrète dans le travail et les services communautaires afin que le rythme de la vie entre dans l’esprit, le cœur et… le corps qui est de la partie !

Axelle : Ah bon ?

Sr Marie Pascale : Mais oui ! C’est tout notre être qui est appelé au Carmel et pas seulement nos grandes aspirations !

Axelle : Mais quand on est sûre de vouloir être tout à Lui, est-ce que ce n’est pas suffisant ?

Sr Marie Pascale : Eh bien, précisément, on n’en est bien sûre que lorsque notre vie tout entière (vie spirituelle, psychique et physique) nous le confirme… et cela se vérifie dans le temps !

Axelle : Quand même ! C’est long ! … Et après, c’est bon ?

La profession temporaire

Sr Marie Pascale : Oui, si notre être concret acquiesce à cette forme de vie cachée et amoureuse au service de l’Eglise, nous pouvons demander à faire profession

 Axelle: Pour de bon ?

Pascale : Pour de bon … mais de façon temporaire, pour trois ans …

Axelle : Eh ben, si tous les jeunes qui sortent ensemble prenaient autant de temps avant de s’engager dans le mariage ! …

Sr Marie Pascale : Ça ferait sans doute des couples plus durables, oui ! A cette étape où l’on devient professe temporaire, on entre davantage dans les services communautaires, de la liturgie et on apprend à travailler intellectuellement davantage en solitude (encore que les enseignements au noviciat durent encore deux ou trois ans) ….

Axelle : Si je comprends bien, il y a un changement qui intervient encore ?

Sr Marie Pascale : Je pense bien ! Avant d’entrevoir les vœux solennels et pour s’y préparer plus intensément on « entre en communauté ». Par ce rite, la jeune professe quitte le noviciat et va continuer sa vie de dialogue (qui avait été entamée avec la formatrice) avec la prieure, à un rythme qui va aller progressivement et de façon souple, d’une semaine, à quinze jours puis tous les mois. Parallèlement, elle va consacrer ses temps d’étude à approfondir ce que sera son engagement définitif. C’est un temps très fort, mais aussi très exigeant. Elle est davantage en communauté et peut se sentir moins entourée qu’au temps du noviciat. Elle s’exerce à vivre ce que Madeleine Delbrel, une grande amie du Carmel, appelait « la spiritualité du vélo ».

Axelle: Pardon ?

Sr Marie Pascale : le vélo a deux roues comme chacun sait…

Axelle Euh ! Oui… Et alors ?

Sr Marie Pascale : La première est la solitude et la seconde est la vie communautaire. Pour que le vélo roule, il faut deux choses : que la chaîne soit bien à sa place et…

Axelle: Pédaler !

Sr Marie Pascale : Tu as tout compris !

Axelle : Et au bout de combien de temps sait-on pédaler ?

Sr Marie Pascale : La formation se déroulant sur 9 à 12 ans selon la maturité de la jeune, il lui faut quelque temps pour obtenir son permis de pédaler !

Axelle : Comme on a son permis de conduire ?

La profession solennelle

Sr Marie Pascale : Oui ! A cette étape, si elle en fait la demande et que la communauté juge que la jeune est réellement prête pour le don définitif, elle peut faire sa profession solennelle. Après quoi, on roule et c’est en roulant dans le temps qu’on devient apte à rouler.

Axelle : Bon ! Mais alors, si j’entends bien, on n’est jamais vraiment carmélite ?

Sr Marie Pascale : Tu as bien entendu ! On le devient « très peu à peu » comme dit si bien notre Père St Jean de la Croix et c’est pourquoi la formation continue est si importante !

Axelle : La formation continue ?

Sr Marie Pascale : La communauté continue de se former en invitant des intervenants à temps réguliers. Elle envoie aussi une ou l’autre sœur en session pour approfondir sa formation ou se perfectionner dans son travail …

Axelle : Parce qu’il y a des sessions ?

Sr Marie Pascale : Oui, dès le noviciat, les jeunes sont invitées à des sessions réalisées pour elles par la fédération et il y en d’autres prévues pour les professes solennelles en fédération ou au Service des Moniales

Axelle : Ça c’est bien !

La formation continue

Sr Marie Pascale : Mais il ne faut pas oublier que la première intéressée dans sa formation, c’est la sœur elle-même ! C’est donc à elle de veiller à ses rencontres mensuelles avec sa prieure pour faire le point, et au choix de ses lectures pour piocher les grandes avenues ouvertes pendant la formation initiale…

Axelle: Je vois, c’est à la jeune de se prendre en charge en quelque sorte !

Sr Marie Pascale : Oui !

Axelle : On pourrait se revoir ?

Sans oublier la saison des fruits