J’ai reçu la foi dans ma famille, dans mon école et aussi dans les « Mouvements catholiques ». J’avais le désir d’aller plus loin ; mais de là à songer à donner ma vie au christ, non, pas du tout ! Jusqu’à l’âge de vingt ans, je pensais plutôt au mariage où alors je me disais que si je ne mariais pas, être missionnaire me passionnerait aussi, beaucoup de choses me passionnaient !

C’est au cours d’une maladie, qu’un prêtre que je connaissais depuis longtemps m’a apporté quelques livres, parmi lesquels il y avait une vie de Thérèse. Je l’ai ouverte au hasard et suis tombée sur des pages qui m’ont bouleversée : dans mon esprit, avant cette lecture, je ne pensais pas que Dieu pouvait être aussi présent à notre vie et je me disais que la sainteté n’était pas pour moi !

Lorsque j’ai lu : « je serai l’amour au cœur de l’Eglise, ainsi je serai tout », j’ai compris que tous mes désirs seraient alors réalisés par ce chemin de l’union au Christ. Cet Amour qui rayonne partout m’a complètement retournée. Je me suis alors posé très sérieusement la question de la vocation carmélitaine. J’en parlais à un prêtre, qui me dit qu’il sentait que j’avais « une âme contemplative ». Oh là là, pensais-je, où est-ce qu’il m’embarque, moi, une âme contemplative ?!? Moi qui courrais par tous les chemins à droite à gauche avec mes amies… Nous avons cheminé un certain temps, puis il m’a proposé de faire une retraite avec un Père Carme. J’étais prête à tout pour savoir ce que Dieu voulait de moi ; je serais allée à New York si on me l’avait demandé !

Et me voilà partie au carmel, où j’ai rencontré le Père Carme Victor Sion avec qui j’ai dialogué à fond. Il m’a laissée très libre, et m’a redonnée à lire les Manuscrits de Thérèse, en y soulignant ce qui me touchait. Après cet exercice, il ne faisait plus de doute pour lui que j’avais cette vocation. Je pris alors ma décision. Lui-même prit contact avec le carmel de Lisieux. Je rencontrai la maîtresse des novices, la prieure, qui me firent attendre plus d’un an car je n’avais alors que vingt ans. A cette époque, ce n’était pas si jeune, mais tout de même. J’avais hâte de rentrer, et m’étonnais qu’elles me fassent attendre. Elles m’ont d’ailleurs mise à l’épreuve, car j’étais bien centrée sur Thérèse évidemment, aussi me demandèrent-elles ce que je penserais d’aller dans un autre carmel (on a beau aimer Thérèse, on ne rentre pas au carmel pour elle !). « C’est comme vous voulez, moi je viens pour vivre avec le Christ. Thérèse m’a conduite au Christ, et c’est le Christ que je désire suivre. » Quand elles ont vu que j’étais prête à aller n’importe où pour lui, elles m’ont finalement proposé de rester là, et voilà comment je suis entrée.

Ce qui m’attire dans la vie du carmel, c’est donc de vivre avec Lui cette union qui peut embraser le monde entier – comme me l’a fait comprendre Thérèse. Si je prie avec le Christ, je suis missionnaire, reliée à TOUS, à TOUT l’univers terrestre et céleste.

Depuis que je suis ici, je vis toujours de cette certitude que la prière a un rayonnement non seulement sur l’humanité mais sur tout le cosmos, sur tout ce que Dieu a créé en ce monde et dans l’au-delà bien sûr ! C’est vraiment mon bonheur, ma joie. Toutes les vocations sont belles. Tous nous pouvons vivre de cette Vérité féconde : un chrétien ne se rend pas souvent compte de tout l’impact de sa prière. Quelle espérance apaisante et joyeuse dans une vie ! Présentement et dans celle à venir.

Je me dis parfois : « Mon Dieu, est-ce que j’aurais été capable de faire face à tout ce que les foyers assument ? » Je crois que Dieu m’a conduite ici parce que j’étais faible, fragile. Les gens croient le contraire, ils nous prennent pour des personnes hors du commun mais ils ne savent pas ce que nous découvrons ici dans la prière : à quel point nous sommes aimés dans notre pauvreté. Dans la prière, nous découvrons toutes les limites de notre être humain mais surtout tous les dons de Son Amour. On ne s’y attend pas ! C’est une expérience extraordinaire : c’est là que nous rejoignons le vrai de l’humanité. C’est comme si Jésus nous disait : « Descend, descend, rejoins-moi, Moi j’ai vécu tout cela. J’ai tout donné, pour tout offrir à ceux qui croient. » Nous souhaitons toujours être « au top », alors que Thérèse nous rappelle que plus on est petit, confiant en Lui pour tout, plus Jésus veut nous aimer, nous combler. Combien de fois cette réalité m’a remise en route !

Ma phrase biblique préférée : « Que tous soient un » (Jn 17). Lorsque je la prie avec Jésus, je suis au cœur du cœur de son Âme. Ce chemin d’unité est un fil conducteur dans ma vie, c’est une passion pour moi. Dans la joie comme dans la souffrance je reviens toujours à cette prière : « pour que tous soient Un dans l’AMOUR ».

Une soeur carmélite